30 Carlos M. Vilas, « Le populisme comme stratégie d’accumulation : l’Amérique latine », dans Le populisme en Amérique latine, p. 34. Les catégories « régimes militaires », « régimes civils » ou « régimes démocratiques » relèvent de ce type d’approche auquel N. Chazan reproche de confondre les méthodes de changement de régime et leurs résultats. Publié le : 26/09/2020 - 06:47Modifié le : 26/09/2020 - 19:03. 25 Jean du Bois de Gaudusson, « Madagascar : A Case of Revolutionary Pragmatism », dans John Markakis et Michael Waller (dir. L'indépendance fut proclamée le 11 août 1960 par François Tombalbaye. Les formes ont varié ensuite, à partir des premiers coups d’État et de l’introduction des partis uniques. La marche vers l’indépendance commence en 1956 et se fait en trois étapes : l’adoption de la loi-cadre en 1956, qui instaure un système similaire au gouvernement responsable britannique ; le référendum de 1958 qui instaure une association entre la France et des territoires autonomes dans le cadre d’une communauté ; et l’indépendance en 1960. » Par conséquent, il y a très peu d’alternance au pouvoir, avec les dirigeants en place reconduits indéfiniment. 30En l’absence de légitimité, les régimes africains de cette période se caractérisaient aussi par une tendance à l’autoritarisme puisqu’en l’absence de règles acceptées, les dirigeants devaient user souvent de la force ; laquelle devenait une ressource en vue de se maintenir au pouvoir, comme nous le verrons plus bas. 75 Achille Mbembe, « Notes provisoires sur la postcolonie », Politique africaine, no 60, décembre 1995, p. 78. 21Ce concept problématique de populisme est employé ici en référence, empiriquement, au discours des pouvoirs qui mettent l’accent sur « le peuple » et « le développement à la base » et qui prétendent construire une « démocratie » et « le bonheur pour le peuple ». Ce sont des maux que pointe également le dernier rapport sur la démocratie dans le monde publié en début d’année par le magazine britannique The Economist. Depuis 1958, la France est une république constitutionnelle et un régime parlementaire. 27Chacun des régimes énumérés ci-dessus présente ses spécificités, mais trois grandes tendances de la politique africaine les traversent tous : un profond déficit de légitimité, une tendance à l’autoritarisme et la domination effective ou potentielle des militaires. Comme le remarque René Lefort, le régime socialiste a produit en Éthiopie un véritable basculement à gauche, de sorte que le pays a vécu en quelques mois une transformation si profonde que plus rien n’est plus comme avant. Ensuite, nous tentons de dégager les principales caractéristiques des régimes africains postcoloniaux. L’exercice du pouvoir en Afrique postcoloniale. Les fondements de la gouvernance africaine, 5. Tout l’enjeu de la démocratisation étudiée aux chapitres 7, 8 et 9, et en partie, celui de l’intégration étudiée aux chapitres 10 et 11, consiste à rompre avec ces tendances encastrées dans le néopatrimonialisme qui ont dominé la politique africaine pendant trois décennies. Contentons-nous ici d’en exposer trois : la force, l’argent et le sens. Il consiste à opérer une distinction sur la base de ce que les régimes prétendent être ou ce que l’apparence donne à voir. Elle a dépassé le milliard en 2017. Vérifiez si votre institution a déjà acquis ce livre : authentifiez-vous à OpenEdition Freemium for Books. La culture du chef, qui caractérise les sociétés africaines traditionnelles, est alors pointée du doigt par les observateurs pour expliquer pourquoi la culture démocratique a tardé à prendre racine dans le continent. Il étend ensuite son analyse aux autres pays africains pour montrer comment « la grande masse des paysans se soumet avec réticence aux objectifs économiques des autres classes63 ». Nous serons alors mieux en mesure de mesurer l’ampleur des transformations auxquelles ces tentatives ont mené. Selon Chazan et ses collègues, les populismes émergent en Afrique dans les années 1980 (sauf en Libye, où M. Kadhafi prend le pouvoir dès 1969) en réponse à la désagrégation politique et économique. 37User de la force et de l’argent ne suffit cependant pas à maintenir la domination. Ce fut d'abord dans la colonie, où existait depuis assez longtemps une petite élite indigène, essentiellement wolof et aku (descendants des anciens esclaves libérés), que se développèrent les premiers … L’indice de 4,26 qu’attribuent les spécialistes du magazine à l’état de la démocratie en Afrique subsaharienne est le plus bas depuis 2010. 34Pour comprendre comment les régimes africains ont tenu pendant trois décennies, le recours au modèle d’analyse du politicien investisseur proposé par Jean-Patrice Lacam est utile. Dans les régimes néopatrimoniaux africains, l’activité politique est, peut-être plus qu’ailleurs, accaparée par le souci de demeurer au pouvoir en raison de l’ampleur du déficit de légitimité. Au soixantième anniversaire du premier mouvement d’indépendances de l’Afrique, quel bilan peut-on établir de la démocratisation réelle du continent ? Le Sénégalais Senghor, tout comme l’Ivoirien Houphouët-Boigny ou encore le Guinéen Sékou Touré, avaient été, on s’en souvient, députés au Parlement français. L'élaboration et la gestion de la politique économique du gouvernement actuel ont été généralement positives. En revanche, les autoritarismes modérés, dont l’auteur dit qu’ils ont été les cas les plus fréquents, laissent une certaine marge à la société civile et recourent plus modérément à la violence. 26La présentation des différents types de régimes politiques ci-dessus nous donne une bonne idée des logiques institutionnelles ou idéologiques plurielles sur lesquelles les gouvernements africains ont été basés pendant la période 1960-1990. ), Sultanistic Regimes, Baltimore, Johns Hopkins University Press, 1998. Car la Belgique, mais surtout Bruxelles, était si belle et si ensoleillée hier, qu’il semblait que l’astre du jour avait délibérément choisi de rayonner de toute sa splendeur pour souligner que ce jour-là n’était pas un jour comme les autres54. Dans le sillage de ces recherches de vérité sur notre histoire nationale, une seconde opération était alors embrayée, tout aussi brûlante pour la Confédération: celle de l'étude des relations politiques et économiques de la Suisse avec l'Afrique du Sud durant l'apartheid, plus précisément entre 1945 et 1990. Du désordre comme instrument politique, Paris, Économica, 1999, p. 89. La conférence avait nommément écarté « toute perspective de selfgovernement, même lointaine ». 43En ce qui concerne l’État et les régimes autoritaires, les populations africaines ont très rapidement développé des phénomènes d’« escapisme », c’est-à-dire des stratégies destinées à échapper à l’ambition totalisante des pouvoirs. Les classifications peuvent aussi adopter un critère idéologique qui aboutit à distinguer des régimes libéraux, communistes, socialistes, corporatistes, etc. Comme le montre bien J. Ainsi, « les réformes politiques préconisées par [la conférence de 1944] de Brazzaville restèrent extrêmement limitées ». Face aux défis politiques et économiques de la période post-indépendances, la plupart des États africains instaurent des régimes autoritaires, dirigés par des dictateurs souvent violents dont les plus connus s’appellent Idi Amin Dada, Bokassa, Mengistu et Mobutu. Dans le rang de ces démocraties avancées, se situent notamment les îles du Cap-Vert, le Ghana, l’île Maurice, la Namibie, le Sénégal, la Tunisie, le Botswana, l’Afrique du Sud, le Bénin, Sao Tomé et Principe. En effet, trois difficultés doivent être résolues au préalable : d’une part, il faut choisir parmi la diversité des critères de classification. En 2013, on compte 2 430 100 étudiants, 8 fois plus qu’en 1960. 2004. 31 René Otayek et al. » La force n’est donc pas la seule ressource sur laquelle se fonde la domination. Une simple analyse des différents types de régimes cités ci-dessus montre la prépondérance des militaires et leur présence dans tous les types de régimes. L’impact de l’évolution des politiques familiales sur le revenu des ménages entre 1990 et 2002. publié le 01.01.04 mise à jour 18.08.10. Selon Chabal et Daloz, « il est ainsi courant d’interpréter toute occurrence néfaste comme relevant de manœuvres occultes57 ». Les afro-marxismes qui émergent à l’époque des théories indépendantistes (voir chapitre 2) dans les années 1970 sont plus des régimes à prétention marxiste que des régimes marxistesléninistes aussi bien sur le plan de l’architecture institutionnelle que sur le plan économique20. 16Comme indiqué ci-dessus, la plupart des pays colonisés par la France et l’Angleterre ont hérité du modèle institutionnel de l’ancienne métropole. Toutefois, des Suisses y ont pris part dans le sillage des puissances européennes. L'histoire de l'Afrique du Sud de 1948 à 1994 est marquée par la mise en place puis par le démantèlement de la politique d'apartheid.Successivement nommée Union d'Afrique du Sud puis République d'Afrique du Sud à partir de 1961, le pays connaît, durant cette période, un système de ségrégation raciale institutionnalisée. Les stratégies d’opposition, par contre, ne fuient pas l’affrontement avec l’État. On peut aussi parle… C’est précisément cette logique de la familiarité et de la domesticité qui a, pour conséquence inattendue, pas forcément la résistance, l’accommodation, le « désengagement », le refus d’être capturé ou l’antagonisme entre les faits et gestes publics et les autres « sous-maquis », mais la « zombification mutuelle » des dominants et de ceux qu’ils sont supposés dominer75. Au Sénégal, pourtant souvent présenté comme un modèle de démocratie, le pluralisme était contrôlé, le parti socialiste s’étant arrangé pour toujours l’emporter, et il a fallu attendre l’année 2000 pour qu’il y ait une alternance entre deux partis différents13. Ainsi, Chazan et ses collègues classent le Bénin parmi les régimes de parti centraliste alors que Bratton et Van de Walle le mettent parmi les régimes de parti unique plébiscitaires. 10À partir de ce moment, sous une dominante autoritaire, les types de régimes se diversifient énormément. Ainsi, au Burkina Faso31, T. Sankara conduisait une Renault 5 et faisait de « l’avion-stop », profitant des aéronefs de ses pairs pour aller aux conférences internationales plutôt que d’avoir un avion présidentiel. On estime habituellement qu’elle aurait fait entre 4 000 et 6 000 morts69. 42L’analyse en termes de néopatrimonialisme et des régimes qu’il structure constitue une vue de la politique en Afrique par le haut, c’est-à-dire une approche qui met en exergue l’Afrique des institutions, des élites et du pouvoir. Ils contrastent donc avec le caractère sanglant des sultanismes, tel celui de Macias Nguema en Guinée équatoriale. Cependant, en raison du néopatrimonialisme et de l’autoritarisme, ils sont portés à leur paroxysme, ce qui n’est pas forcément efficace comme nous le verrons avec le développement de phénomènes de réaction politique dans le camp des dominés. Ce manque provient en premier lieu de ce que Gérard Conac a appelé une « déficience de légitimité institutionnelle42 ». Les racines de l’autoritarisme postcolonial. Vous pouvez suggérer à votre bibliothèque/établissement d’acquérir un ou plusieurs livres publié(s) sur OpenEdition Books.N'hésitez pas à lui indiquer nos coordonnées :OpenEdition - Service Freemiumaccess@openedition.org22 rue John Maynard Keynes Bat. Merci, nous transmettrons rapidement votre demande à votre bibliothèque. 45À la fin des années 1980, l’autoritarisme s’était généralisé en Afrique. Où en est le processus en 2020 ? ), L’Afrique en transition vers le pluralisme politique, Paris, Économica, 1993, p. 16. Maurice a connu la première alternance au pouvoir en Afrique à la suite d’élections en 1982 et au Botswana, le système peut être considéré comme une démocratie consolidée, car, bien qu’il n’y ait encore jamais eu d’alternance, les libertés sont respectées et le jeu électoral est transparent12. Auréolé de cette « légitimité historique » conférée par la prise des armes, ce groupe a généralement instauré dès le départ un régime autoritaire. Tyran sanguinaire, il a régné d'une main de fer sur son pays aux richesses minières fabuleuses. Le 19 janvier 1962, tous les partis politiques, excepté le P.P.T., furent interdits. À la fin des années 1980, d’autres auteurs remarquent qu’un équilibre précaire s’était établi entre l’État et la société en Afrique, car les individus et les groupes développent des relations tantôt d’indifférence, tantôt d’immersion par rapport à l’État64. 33 Comi Toulabor, Le Ghana de J. J. Rawlings. Selon eux, les types de régimes doivent refléter ces aspects souvent latents plutôt que de se focaliser sur les proclamations ou les apparences. Au Congo, les Belges, n’entrevoyant pas d’indépendance avant 30 ans, n’ont rien préparé, de sorte que, « quinze jours après l’indépendance, le pays sombrait dans le chaos2 ». La constitution de comités de défense de la révolution, de tribunaux populaires et l’ascétisme des leaders marquent leur volonté de rompre avec le patrimonialisme. 25Comme Elisabeth Wood a pu le montrer, ce régime était fondé sur des logiques irréconciliables, à savoir qu’il entendait reposer sur la main d’œuvre de la majorité noire pour faire fonctionner l’économie et préserver les privilèges des Blancs, tout en continuant à exclure les Noirs du jeu politique38. 52 Richard Joseph, Democracy and Prebendal Politics in Nigeria, the Rise and Fall of the Second Republic, Cambridge, Cambridge University Press, 1987. Les chefs partagent plusieurs points communs : ils s’attribuent des pouvoirs dans tous les domaines, y compris divin ; ils sont brutaux et recourent excessivement à la force ; ils ne sont limités dans leur arbitraire ni par des principes moraux, ni par des institutions, ni par des collègues37. 36 Jean-François Médard, « Autoritarismes et démocraties en Afrique noire », Politique africaine, no 43, octobre 1991, p. 97. Le document final de la conférence de Berlin stipule que Léopold de Belgique reçoit, à titre personnel, deux millions et demi de kilomètres soit l’actuel République Démocratique du Congo. 20 Edmond Keller, « Afro-Marxist Regimes », dans Edmond Keller et Donald Rothchild (dir. La décolonisation s’est faite parfois par étapes comme dans les colonies françaises et anglaises où, dès l’après-guerre, l’idée d’une autonomie des territoires commence à être évoquée ; mais elle s’est faite aussi par rupture, comme dans les colonies portugaises et belges où l’idée d’accorder l’autonomie aux territoires africains n’était pas envisagée, ce qui eut pour conséquence le déclenchement de guerres de libération. Selon l'historien Nic Cheeseman, «il y a presque autant de démocraties défectueuses que de régimes autocratiques parmi les 54 États du continent». OpenEdition est un portail de ressources électroniques en sciences humaines et sociales. Parmi la panoplie de ressources coercitives utilisées dans les régimes africains de l’époque, les plus courantes sont l’usage de la violence et l’instrumentalisation de la justice. 60 Jean-François Bayart, « La politique par le bas en Afrique noire : questions de méthode », Politique africaine, no 1, janvier 1981, p. 52-82. 4 Catherine Cocquery-Vidrovitch et Henri Moniot, L’Afrique noire de 1800 à nos jours, p. 122-123. Durant la période suivant immédiatement l’indépendance, les gouvernants commencent à concentrer le pouvoir entre leurs mains. Le processus de libération s’est terminé avec la chute du régime d’apartheid en Afrique du Sud en 1991. 11Les auteurs ont toujours échoué à dresser une typologie uniforme des régimes politiques africains. L’école du politique par le bas (voir chapitre 2)60 et l’école interactionniste61 ont mis en évidence de nombreuses manifestations de la vitalité de la société. Ils distinguent deux sous-types de régimes de parti unique : les régimes administratifs-hégémoniques qui sont souvent le fait de chefs historiques comme Amadou Ahidjo au Cameroun ou de militaires reconvertis ; et les régimes de partis mobilisateurs – proches des régimes populistes ou des afro-marxismes – qui sont le fait de pères fondateurs ayant de grandes tendances socialistes comme Julius Nyerere en Tanzanie, Sékou Touré en Guinée ou Houari Boumedienne en Algérie15. 23Ironiquement, même si l’apartheid, qui signifie « séparation » en afrikaans (la langue des Afrikaners sud-africains) a été une politique de ségrégation violente, le régime a voulu faire passer l’idée que sa politique de ségrégation raciale en était une de « développement séparé des races ». Sauf l’Afrique subsaharienne, qui est actuellement à peine sous les 5 enfants par femme. Les matières premières, la terre, la main-d'œuvre bon marché étaient l… Par exemple, le Burkina Faso et le Ghana, classés dans la catégorie des régimes populistes, étaient tous deux dirigés par des militaires, T. Sankara et J. Rawlings. Dans son modèle, chaque homme politique dispose d’un stock de ressources qu’il gère selon une stratégie d’accumulation et de restructuration permanente pour tenir compte, comme le ferait l’investisseur en économie, de l’évolution du marché politique. 39 Jacques Lagoye, « La légitimation », dans Madeleine Grawitz et Jean Leca (dir. Le retour au parti unique est présenté comme une façon de renouer avec les formes africaines précoloniales de gouvernement fondées sur le consensus. Parmi la diversité des manifestations possibles de cette vitalité, trois types ont été particulièrement dominants : les phénomènes d’« escapisme », les phénomènes de résistance et la dérision politique. 7 Naomi Chazan et al., « Regimes in Independent Africa », dans Naomi Chazan et al. Au moment des indépendances, la démocratie en Afrique était une idée neuve, même si le personnel politique alors aux manettes, en Afrique francophone comme en Afrique anglophone, était familier des pratiques occidentales de la démocratie élective multipartite. 1 - Alors qu’au début des années 1990, l’Afrique se targuait d’avoir seulement trois démocraties sur les 53 pays que comptait alors le continent, aujourd’hui lorsqu’on croise les différents indicateurs de la maturité électorale et ceux de la maturité économique (Afrobaromètres, Freedom House, Mo Ibrahim, et Economist Intelligence Unit) on trouve pas moins d’une dizaine de pays qu’on pourrait qualifier de « démocraties matures » qui connaissent des alternances de partis au pouvoir, des élections libres et transparentes et un parlementarisme actif. Du reste, les Soviétiques classaient le Bénin parmi les pays « à orientation socialiste », voire « qui se disent à orientation socialiste24 ». 15Les régimes ci-dessous ont émergé à des périodes particulières de l’histoire postcoloniale africaine en réponse à des conjonctures particulières. Or, ils peuvent ne jamais l’être parce que les acteurs sont impuissants, ou ne conçoivent même pas une telle possibilité, comme dans le cas des paysans. Le milliardaire d'origine "Mo" Ibrahim dirige une fondation destinée à améliorer la gouvernance en Afrique. Anniversaire des indépendances africaines. À ceux-là s’ajoutent des pays en cours de démocratisation et dont font partie pêle-mêle la Gambie, l’Éthiopie, le Nigeria, l’Algérie, le Maroc, le Kenya, la Zambie et Madagascar. Suivant en cela la distinction classique de Robert Dahl, ils proposent cinq types de régimes entre 1960 et 1989 : les régimes de parti unique plébiscitaires (cas du Niger sous A. Saibou) ; les oligarchies militaires (cas du Lesotho), les régimes de parti unique semi-compétitifs (cas de la Côte d’Ivoire sous Houphouët-Boigny) ; les oligarchies raciales (Afrique du Sud et Namibie) ; et les régimes multipartites (cas du Sénégal)9. D’autre part, il faut échapper à la grande instabilité des régimes dans le temps et dans l’espace, puisque chaque pays peut connaître plusieurs régimes sur des périodes de temps relativement courtes. Les populismes sont proches sur le plan idéologique des marxismes, mais mettent l’accent sur le peuple auquel ils disent vouloir remettre le pouvoir. 3 Herbert Weiss, « Introduction », dans Catherine Coquery-Vidrovitch, Alain Forest et Herbert Weiss (dir. 44L’« escapisme » diffère de l’opposition, car il se caractérise par un repli plutôt passif hors de l’atteinte de l’État. 73 Achille Mbembé, De la postcolonie, p. 140. Elle laisse quelque peu de côté les logiques sociales et, notamment, elle ne nous dit pas ce que devient la société face à ces régimes et leurs pratiques politiques59. 2 Catherine Cocquery-Vidrovitch et Henri Moniot, L’Afrique noire de 1800 à nos jours, Paris, PUF, 2005, p. 128. 9À l’indépendance, la plupart des pays africains avaient adopté un modèle parlementaire pluraliste. 63 Goran Hyden, « La crise africaine et la paysannerie non capturée », Politique africaine, no 18, juin 1985, p. 93. En effet, à partir du moment où ces régimes n’étaient pas basés sur des règles et des procédures acceptées par les élites non liées au pouvoir et la population, ni les appareils spécialisés de domination (la police, la justice, l’administration…) ni surtout les dirigeants (président, ministres…) ne pouvaient bénéficier d’une légitimité autre que formelle. 9 Michael Bratton et Nicolas Van de Walle, Democratic Experiments in Africa, p. 77-82. Dès 1988, Anyang Nyong’o évoque des révoltes populaires71 et, avant lui, dès le début des années 1980, la revue Politique africaine introduisait les thèmes du politique par le bas, de la dérision et des modes populaires d’action politique. Rappelons qu’à la fin de 2019, quatorze chefs d’État africains étaient au pouvoir depuis plus de vingt ans. ), Le Burkina entre révolution et démocratie, 1983-1993, Paris, Karthala, 1997. Dans ces deux cas, sauf la situation spécifique des colonies de peuplement d’Algérie, d’Afrique du Sud et du Zimbabwe, la décolonisation a été généralement négociée et mise en chantier par étapes. Arrivé au pouvoir par un coup d’Etat en 1965, Joseph-Désiré Mobutu est resté 32 ans à la tête de la République démocratique du Congo (anciennement le Zaïre). En effet, grosso modo, une corrélation forte existe entre le mode de décolonisation et la nature des régimes qui ont immédiatement été installés. Selon Médard, « les autoritarismes durs connaissent un fort degré de violence et ils reposent sur une peur permanente et insidieuse plus que sur la terreur49 ». 49Est-ce à dire que la dérision était un instrument d’opposition, plus précisément qu’elle était une forme de revendication démocratique avant l’heure ? Comme un verre grossissant, l’utilisation d’une telle perspective permet de mieux La population de l’Afrique subsaharienne aura été multipliée par près de 5 fois entre 1960 et 2020, contre 2,7 fois pour l’ensemble de l’Asie et 3 fois pour l’Amérique latine. 10 Voir Mamoudou Gazibo et Jane Jenson, La politique comparée : fondements, enjeux et approches théoriques, Montréal, les Presses de l’Université de Montréal, 2004. Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search, Gazibo, M. 2010. À l’accession à l’indépendance, les colonies britanniques étaient dotées d’un régime parlementaire et gouvernées par des premiers ministres élus. Ainsi, en Guinée équatoriale, le degré de violence et surtout l’arbitraire et l’imprédictibilité du comportement de M. Nguema étaient tels que près de la moitié de la population a été tuée ou contrainte à l’exil. In. Le rôle des militaires – et surtout du chef militaire au pouvoir – dans la vie politique africaine s’est accru au point qu’on ne peut pas vraiment ériger une catégorie « régime militaire » séparée. Il s’agit plutôt d’une donnée diffuse, ce qu’on qualifierait de « régime militaire » étant loin d’être une catégorie homogène45. C’est cette crise de légitimité qui explique, selon les mots d’Achille Mbembé, le fait que « des dictatures assoupies la veille au soir sous un flot de motions de soutien se réveillent le lendemain, leurs vaux d’or fracassés et leurs tables de la loi renversées44 ». Sachant que les régimes se sont constamment chevauchés, on peut partir du fait que, dans les années 1960, la plupart des pays arrivés aux indépendances étaient pluralistes. La faculté d’accorder le pardon, et même de récompenser après avoir puni, fait partie de la stratégie destinée à forger l’image de marque du chef51. 38 Elisabeth Jean Wood, « Apartheid, Conservative Modernization and Mobilization », dans Elisabeth Jean Wood, Forging Democracy From Below: Insurgent Transitions in South Africa and El Salvador, Cambridge, Cambridge University Press, 2000, p. 111-142. En effet, tel que le montre J. Lagroye, la légitimité est une question qui ne peut pas être réduite à la légalité ou à la « légitimité formelle » des dirigeants et de leurs actes, mais suppose, entre autres, l’acceptation des élites et de la population39. Ici, l’accès aux postes et aux richesses de l’État est octroyé sélectivement aux clients du régime. France 2 France Télévisions. Guglielmo Ferrero soutient la même idée en montrant que la légitimité renvoie à la question du droit de commander et du devoir d’obéissance que rien ne peut justifier, sauf le consentement40. Ils introduisent ainsi une formule d’inclusion politique non élitaire32. 72 Crawford Young, The African Colonial State in Comparative Perspective, New Haven/Londres, Yale University Press, 1994, p. 7. Celui-ci déplorait encore récemment que les dictateurs du continent soient mieux connus que ses démocrates, citant l’exemple d’un ancien chef d’État africain qui a dû lui-même appeler un taxi après la passation de pouvoirs ! RFI - Actualités, info, news en direct - Radio France Internationale. C’était sans compter avec les dynamiques de l’histoire, de la géopolitique et des idéologies dominantes, qui ont sérieusement compromis le processus de la démocratisation des pays africains au cours des décennies qui ont suivi les premières indépendances, suscitant parfois des doutes sur l’adéquation du modèle démocratique occidental à la manière de faire du politique sur le continent. ), Afro-Marxist Regimes: Ideology and Public Policy, Boulder/Londres, Lynne Rienner, 1987, p. 1-21. Plusieurs thèses sont en présence. La même observation est faite par J. de Gaudusson qui, dans le cas de Madagascar, parle d’une révolution pragmatique intégrant la bourgeoisie au régime et ne disposant pas vraiment de structures révolutionnaires25. Pour nombre d’observateurs, cette déferlante politique serait à l’origine des soulèvements du Printemps arabe qui fera vaciller les régimes arabes à la fin des années 2000 et conduira à la chute de Ben Ali à Tunis et Moubarak au Caire. (dir. Cette statistique présente le prix moyen du pétrole brut de l'OPEP entre 1960 et 2019. © 2021 Copyright RFI - Tous droits réservés. Gonidec montre qu’« au Togo, après le complot de 1969, les magistrats qui avaient refusé de condamner les accusés, en l’absence de preuves suffisantes, eurent un sort moins heureux. 12Parmi les divers critères de classification possibles7, celui de l’auto-appellation ou du nominalisme est le plus intuitif. -P. Daloz et P. Chabal, L’Afrique est partie ! Alors que les autoritarismes durs instrumentalisent la justice et la police pour tuer, comme au Togo d’Eyadéma, les modérés l’utilisent pour faire peur. « Entre 1990 et 1999, écrit Pierre Jacquemot, on compte 192 élections présidentielles et législatives dans 45 pays. 14On le voit, la tâche n’est pas facile. Lorsque ces mouvements n’étaient pas les seuls à combattre pour l’indépendance, comme dans le cas angolais, une guerre civile pouvait éclater, les autres mouvements rivaux refusant de reconnaître les nouveaux maîtres du pays, ce qui confortait la tendance autoritaire. L’exercice du pouvoir en Afrique postcoloniale”. 41 Jacques Lagoye, « La légitimation », p. 398. Les chercheurs ont forgé le terme de « présidentialisme négro-africain » pour caractériser l’hypertrophie des pouvoirs du chef, la situation de « surpouvoir » et la personnalisation du pouvoir qui débouchent souvent sur un culte de la personnalité, porté à son paroxysme dans le cas du Togo d’Eyadéma (appelé le sauveur providentiel) par exemple43. Ce fut notamment le cas des anciennes colonies françaises et britanniques. 33Comme on le sait au moins depuis Machiavel, pour ne pas remonter aux Romains, aux Grecs ou aux Égyptiens, la politique est orientée essentiellement vers l’élaboration de stratégies de conquête et de conservation du pouvoir. On compte ainsi chaque année une vingtaine d’élections sur tout le continent. La Gambie a connu une trajectoire similaire à celle du Sénégal. Ainsi, alors que le président Eyadéma du Togo se faisait acclamer aux cris d’Avafiagan ! afrique du sud : quelques repères historiques du processus d’institutionnalisation et de démantèlement de l’apartheid, Portail de ressources électroniques en sciences humaines et sociales, 3. 74 Comi Toulabor, « Jeu de mots, jeu de vilains : lexique de la dérision politique au Togo », Politique africaine, vol. « Rares sont les scrutins africains qui respectent les règles formelles de la démocratie électorale, se lamente Pierre Jacquemot dans son essai. Sur cette base, ils distinguent au cours de la période 1951-1999 sept types de régimes : administratif-hégémonique (cas du Zaïre sous Mobutu), pluraliste (cas du Botswana), de parti mobilisateur (Algérie sous H. Boumedienne), de parti centraliste (cas de l’Éthiopie de Menguistu), personnel coercitif (cas de l’Ouganda de I. Amin), populiste (cas du Ghana sous J. J. Rawlings) et d’effondrement de régime (cas du Zaïre après Mobutu)8. 26 Michael S. Radu et Keith Somerville, « The Congo », dans Chris Allen (dir. 41Ces procédés ne sont pas spécifiques aux régimes africains, il convient de le souligner fortement, car ils sont aussi vieux que le pouvoir politique et se retrouvent en tout lieu et en tout temps. En l’espace de quelques années, l’Afrique subsaharienne est divisée entre les puissances occidentales. Pour ces raisons, et dans une perspective pédagogique qui prend quelques libertés avec les contraintes de la démarche typologique10, nous allons combiner les typologies en recourant librement tour à tour, selon le cas, au degré de concurrence, au style de leadership et à l’orientation idéologique.